(Contribution à la table ronde du Cercle civilisationnel de Yalta – Centre international de l’Institut des stratégies économiques de l’Académie des Sciences de Russie)
Depuis de nombreuses années et en particulier ces dernières trente années, se perpétuent avec régularité des processus destructeurs et avec une nouvelle force explosent confrontations, conflits, guerres, chaos à l’origine de crimes contre l’humanité.
Dans l’individu l’humain disparaît, les valeurs fondamentales de l’humanité sont modifiées, explosent non seulement les fondements intangibles de la morale et des moeurs mais aussi l’héritage ancestral des normes de la société, la décomposition du système des valeurs sur lequel repose des réalités élémentaires tel l’amour de la Patrie, le respect de la valeur humaine, la famille – que pendant des siècle les peuples anciens ont transmis. Tout cela pour essayer d’instaurer le chaos dans le monde.
Pour contrer ces défis et menaces, il est indispensable de renforcer les moyens de l’Institut des peuples autochtones (gardien des traditions et de la préservation de l’identité entre autres).
Tous les peuples autochtones sont unis pour que ne se produise pas leur disparition physique .
L’un des instruments de l’amplification de ce chaos est constitué par le développement des conflits entre: les peuples autochtones; les conflits entre Etats; les conflits internes; entre Etats et peuples autochtones.
(ainsi : les guerres, le génocide, les nettoyages ethniques, les déportations, les réfugiés, les blocus et ainsi de suite).
Pour prévenir ces types de conflits et conjurer le chaos, il faut être unis (obligations) entre l’Etat (les Etats) et le peuple autonome (les peuples). S’il n’y a pas union, les conflits vont perdurer avec révolutions, enfoncement dans le chaos du côté (entre) les Etats et les peuples autochtones.
L’opinion international a bien cerné ces menaces et le 13 septembre 2007 par résolution de l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies a voté «La Déclaration des droits des peuples autochtones» qui stipule que les peuples autochtones:
– Sont égaux aus autres peuples et apportent leur contribution dans la variété et la richesse des civilisations et des cultures et représentent l’héritage de l’humanité
– Ont été victimes des injustices de l’Histoire qui ont conduit, entre autre, à leur colonisation et confiscation de leurs terres, territoires et ressources
– Les peuples autochtones ont droit de s’autodéterminer. Fort de ce droit, ils instaurent librement leur statut politique, et mettent en place, librement, leur cadre économique, social et culturel
– Les Etats se chargent d’assurer les mécanismes de protection, de l’accès au droit
1) contre toute action à finalité ou résultat conduisant à l’atteinte de leur existence physique, de leurs patrimoine culturel ou coutumes qui leur sont propres;
2) contre toute action à finalité ou résultat conduisant à les priver de leurs terres, territoires ou ressources;
3) contre une assimilation forcée ou une intégration sous quelque forme que ce soit.
Les peuples autochtones ont droit:
– de préserver et développer leurs structures politiques, économiques, sociales ainsi que leurs Instituts
– à leur terre, leur territoire, leurs ressources qu’ils possédaient traditionnellement
– de pratiquer et faire renaître leurs us et coutumes traditionnels
– de pratiquer, développer et transmettre leurs traditions spirituelles, religieuses, leurs us et coutumes
– de faire renaître, pratiquer, développer et transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, les traditions orales leur philosophie, leur alphabet, leur littérature.
«La Déclaration des droits des peuples autochtones» doit servir de base pour un partenariat plus solide entre peuples autochtones et Etats.
Malheureusement certains Etats ne remplissent pas les obligations auxquelles ils ont adhéré conformément à la Déclaration de l’ONU concernant les droits des peuples autochtones.
En conséquence, lorsque certains peuples autochtones déclarent leur indépendance, leur Etat refuse de reconnaître la légitimité de ces nouvelles entités. S’en suivent des confrontations dont sont victimes ces peuples autochtones.
Ces nouvelles entités (Artsakh, Abkhasie et autres) sont soumises à diverses sanctions (blocus, guerres, déportations et autres) ayant pour objectif de décourager la formation et l’activité de nouveaux Etats; cela engendre des catastrophes humanitaires.
Lorsqu’ils ont déclaré leur indépendance, les peuples autochtones se trouvent confrontés à une répression agressive de la part de leur métrople et à la condamnation de l’opinion publique internationale: la création de leur Etat est déclarée illégitime.
Les Arméniens d’Arménie Occidentale, en tant que peuple autochtone du Plateau Arménien, à l’instar de n’importe quel autre pays de la terre, ont le droit de vivre, de se développer, d’avoir un avenir. Cela signifie qu’ils ont le droit d’exiger la création de leur propre Etat sur les terres de leur Patrie ancestrale – en Arménie Occidentale.
Au lieu de reconnaître les droits des Arméniens sur leur Patrie historique, de 1894 à 1923, trois gouvernements turcs successifs – du sultan, des Jeunes Turcs et kémaliste – ont perpétué un crime horrible: un Génocide contre le peuple arménien, son expulsion de sa Patrie historique, l’occupation de l’Arménie Occidentale. Tous ces évènements ont conduit à une dramatique diminution de la population arménienne dans la région et à une modification du paysage ethnique en Arménie Occidentale.
Le Génocide perpétré contre le peuple arménien a été dénoncé en premier par les gouvernements de Grande Bretagne, France et Russie qui, dans une déclaration commune du 24 mai 1915 qualifiait les actions du gouvernement turc à l’encontre des arméniens de «crime contre l’humanité et la civilisation» et ont prévenu « de de la responsabilité criminelle de ses organisateurs et leurs émissaires».
Pour ce qui est de la résolution de la Question Arménienne, les décisions fondatrices ont été édictées depuis longtemps mais, à ce jour, non abouties. On peut affirmer que son heure est venue. Nous sommes aujourd’hui devant le fait qu’aucun Etat, aucun peuple du Proche Orient ne sera épargné des menaces actuelles ou futures si aucun d’eux ne choisit une option politique de paix basée sur le droit pour régler les problèmes existants et les conflits.
Toutes les décisions politiques qui ne respectent pas le droit portent en elles situations conflictuelles qui maintiendront en otage les générations suivantes et, tous les cinquante ans et avec plus d’acuité, conflits et confrontations, guerres et chaos vont s’embraser – ainsi dans les Balkans, au Proche Orient, au Caucase et en Afghanistan.
Cela est évident dans le cas des arméniens amshen établis sur trois pays – en République abkhaze, en Fédération de Russie et sur le territoire de leur Patrie historique en Arménie Occidentale – l’Amshen – (actuellement encore occupé par la République turque).
Aujourd’hui les Amshens (élément fortement ancré dans la tradition du Plateau Arménien) se trouvent être le ferment idéologique et géopolitique capable de réhabiliter une gouvernance arménienne sur les terres ancestrales en Arménie Occidentale appuyée sur une stratégie de développement tous azimuts (c’est-à-dire un développement au travers d’une renaissance) de l’Arménie Occidentale du XXIe siècle .
Une majorité d’Arméniens Amshen s’est établie sur les territoires d’Abkhasie, d’Adjarie, de la région de Krasnodar, d’Adygueï, du Caucase Nord et en Crimée. Dans ces régions ils représentent le groupe arménien subethnique le plus important et le plus ancien. Ils sont les descendants de la partie des Amshens non islamisés contraints de quitter leur Amshen natal au moment de la conversion forcée à l’islam et de la turquisation imposée et sont également descendants des victimes du Génocide envers les Arméniens. En tant que chrétiens, ils ont conservé leur propre culture ainsi que la fierté d’appartenir à cette communauté. Ils communiquent en dialecte amshen de la langue arménienne, sont divisés en quelques groupes subethniques dont les noms sont issus des provinces d’Arménie Occidentale – d’Amshen – : les trapezountsis, les ordoustsis, les djeniktsis et autres.
Les diasporas amshen les plus nombreuses se trouvent en Abkhasie et sur les rives russes de la Mer Noire. Et bien sûr il y en a dans leur Patrie historique en Arménie Occidentale – l’Amshen – où ils vivent en communautés soudées.
Si en Russie et en Abkhasie les arméniens amshen sont en grande majorité chrétiens, descendants de la partie des Amshens non islamisés, en revanche en Amshen les arméniens amshen ont été islamisés de force.. Nombre d’entre eux ont perdu leurs racines ainsi que leur identité en tant que nation, ne se reconnaissent pas descendants d’Arméniens et se font appeler khemshils.
Il est très important de les aider à retrouver leurs racines arméniennes. Cette tâche incombe aux structures officielles de l’ONU, aux Instituts de la diplomatie populaire. Il faut créer des foyers de culture et d’éducation arménienne, agir par le biais des médias.
Ces quelques dernières années, dans le cadre des commissions de l’ONU concernant les peuples autochtones (méchanisme des experts de l’ONU), les cadres de l’Arménie Occidentale ont travaillé sur leur problématique, ils ont soulevé les problèmes d’actualité qui inquiètent les arméniens et qui ont attiré l’attention de la communauté internationale.
Les organisations féminines peuvent jouer un rôle particulier en ce qui concerne la prévention des conflits et apporter leur soutien pour une paix durable. Le Conseil de Sécurité de l’ONU, depuis l’an 2000 (résolution n°1325), a ajouté à maintes reprises des amendements incluant les femmes lors des pourparlers, des reconstructions post-conflictuelles ainsi que dans la prévention des conflits. Dans un climat où s’accélère l’ instabilité globale et le développement de conflits internes, de crises, le sens de «prévention des conflits» est plus que d’actualité.
Nous estimons qu’un rôle accru accordé aux femmes dans les décisions politiques serait une des voies permettant de lutter contre les agressions, la violence. Si l’on veut parvenir à une paix solide, il est important de mener un travail pédagogique axé sur la connaissance des autres cultures, la tolérance et le refus de la violence. Il est bon d’y initier les tous jeunes enfants.
Le rôle de la femme s’amplifie dans tous les domaines. Il s’agit d’une tendance globale.
Nous, femmes, ne sommes pas seulement une part du courant de l’histoire mais sa force motrice grandissante. Nous avons notre organisation – l’Union internationale féminine des arméniens amshen «AMSHENKA», créée en 2012. Il s’agit d’une organisation humanitaire féminine.
En conclusion nous dirons que sur le territoire couvert par le Grand Proche Orient, le Plateau Arménien et la région pré-caspienne occidentale le peuple arménien constitue: un peuple très ancien, autochtone, créateur d’une civilisation unique cherchant à la conserver et la développer, facteur déterminant de stabilité et de coopération. Il a droit, comme les autres peuples, à la vie, au développement, à un futur. Aussi, avec les autres peuples autochtones, ayant des droits et des obligations, il doit tendre à l’instauration d’une paix durable et à une véritable coopération avec les peuples de la région et leurs Etats.
Voilà la raison pour laquelle nous manifestons un grand intérêt aux programmes de paix, de stabilisation et de coopération entre les peuples, conditions nécessaires pour éviter une sévère catastrophe dans cet espace.
Nous croyons à la réalisation de cette affaire hautement importante à laquelle tous les peuples autochtones et les autres peuples de la région vont participer. Il n’existe pas d’alternative à la mise en place de la paix et d’une collaboration. Cela doit absolument se réaliser grâce à nos efforts et nos programmes.
15 mai 2019
Saïda Oghanyan – Présidente du Bureau de l’Union internationale féminine des arméniens amshen «AMSHENKA», Député à l’Assemblée Nationale (Parlement) d’Arménie Occidentale, journaliste ethnographe.