Le président de l’Organisation turque des officiers de réserve, le général-lieutenant en retraite Erdogan Karakoush, a affirmé que « l’indépendance du Kurdistan n’est pas dans les intérêts de l’Arménie ». Selon ses dires « L’Arménie n’a jamais abandonné son rêve de recréer une mythique « Grande Arménie ». Il affirme que « si les résultats du référendum aboutissent à la constitution d’un Etat indépendant, cela constituera une situation d’incomfort pour l’Arménie » car « un Etat kurde sur la carte peut contrarier la foi des arméniens quant à une « Grande Arménie » étant donné que les arméniens autant que les kurdes prétendent aux territoires de l’est de la Turquie »
Procédons à des précisions de haute importance. La direction kurde de la région autonome d’Irak , malgré l’opposition du pouvoir central de Bagdad, « les discrets » avertissements des Etats-Unis et de certains de leurs alliés européens, les protestations ouvertes de la Turquie et de l’Iran, organise pour le 25 septembre un référendum concernant l’indépendance. Pour le moment il est question de la création non pas d’un « Grand Kurdistan » mais seulement d’un Etat kurde indépendant au nord de l’Irak. Et ce projet est à la veille de se réaliser. Cela stimule indiscutablement le mouvement kurde à l’échelle de tout le Proche Orient.
Les spécialistes du centre d’études Central Asia Monitor estiment qu’outre l’Irak – avant le début du « printemps arabe » et de la crise syrienne « les conditions pour une lutte politique et autre avait muri seulement dans les milieux kurdes de Turquie. C’est la raison pour laquelle Ankara a tenté au début de jouer avec « ses » kurdes, mais ne s’est pas préoccupée de procéder sur son territoire du sud-est à d’importantes transformations dans les domaines économique, politique et administrativo-territoriaux. Et lorsque au début de la crise syrienne le président Bachar Assad, a octroyé aux kurdes syriens de larges droits, cela a enferré Ankara dans « l’étau kurde » entre l’Irak et la Syrie. Cela a conduit les forces kurdes de la région frontalière, qui déjà fraternisaient, à constituer un bloc qui revêt un caractère d’importance et menaçant pour le gouvernement turc.
D’une manière paradoxale « la formation de DAECH (organisation dont l’activité est interdite en Fédération de Russie) a contribué à actualiser le problème kurde. Ainsi de nombreux experts turcs, représentants des milieux militaires ont commencé à exprimer à voix haute leur craintes concernant la perspective de voir se profiler à l’intérieur des frontières-même du pays deux erreurs de politique intérieure commises par le parti au pouvoir dirigé par le président turc Regep Taïp Erdogan.
La première d’entre elles : pendant la guerre d’Irak de 2003 la Turquie, après avoir signé le traité de Lausanne le 24 juillet 1923, a suivi les dispositions américaines selon lesquelles le mouvement kurde devenait un acteur indépendant politiquement et géopolitiquement au Proche Orient.
La deuxième : Ankara a pris une part active dans ce qu’on appelle « les révolutions arabes » se basant sur les buts proposés par l’Occident. Le calcul d’Erdogan, pensant à lui seul réussir à dominer la problématique kurde en affaiblissant l’unité kurde tant en Turquie qu’au dehors, n’a pu aboutir. Une formation potentielle se profile à la suite d’un Kurdistan irakien : même si ce n’est qu’une autonomie kurde en Syrie – (et en perspective une union au Kurdistan irakien en un Etat indépendant), peut constituer une étape importante dans la reconsidération des frontières tracées lors du Traité de paix de Lausanne.
A l’heure actuelle les SMI turques discutent déjà de la question du tracé non fixé des frontières du « Grand et du Petit Kurdistan » ainsi que de l’identité unitaire ethnique kurde. A ce sujet le président de l’Organisation des officiers de réserve de Turquie, le général-lieutenant en retraite Karakoush, a décidé de se rappeler du projet « Grande Arménie », essayant de convaincre qu’un Etat kurde indépendant créera non seulement des désagréments à l’Arménie mais aboutira à des conflits entre kurdes et arméniens à l’est de la Turquie car ces derniers considèrent cette région leur appartenant. » L’important ici est de comprendre que la Turquie tente de jouer « la carte » arménienne comme un moindre mal plutôt que voir se former sur son sol un Etat kurde.
On peut estimer que la marche des évènements peut signifier d’une part la normalisation des relations arméno-turques et d’autre part la prédisposition à reconnaître obsolètes les Traités de Moscou et de Kars, signés par Ataturk, qui avaient déterminé les frontières des trois pays de la Transcaucasie et de la Turquie. Après cette étape, les frontières entre le supposé Etat indépendant « Grand Kurdistan », la Turquie et les pays de la Transcaucasie pourront se régler aux niveaux turc, kurde et transcaucasien. En troisième lieu, il n’est pas exclu que l’Occident développera une campagne d’information « concernant les véritables amis du peuple arménien » dans le but de détruire les relations arméno-russes pour priver Erévan de l’aide de Moscou.
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Il est pratiquement possible de transformer petit à petit la Turquie en nouvelle Yougoslavie. Yeni çag, journal turc, écrit : « On oblige les turcs à s’habituer au fait que pour eux le Proche Orient pourrait s’arrêter à Gaziantep (ville du sud de la Turquie – S. T.) » Ainsi la Turquie, ayant perdu tous ses alliés, est obligée de diriger vers une alliance avec la Russie et l’Iran, en direction de la Syrie, ne souhaitant pas pour l’instant casser avec les Etats-Unis. Mais le processus créateur « d’un Kurdistan indépendant » est en marche. Se pose la question comment et sous quelle bannière il fonctionnera.
Stanislav Tarassov
20.08.2017
Source : Regnum